Qui nous sommes
Une autofiction politique épistolaire
novembre 2021
Dans une cité populaire, dans une ville moyenne de province vivaient quatre amis, Joachim, Khalid, Yasmine et Automne.
Suite à la mort de Joachim, Yasmine entreprend de documenter la vie de son ami, à travers la création d’un documentaire, recueillant interview et documents vidéos d’archive sur leur vie commune au sein de l’association qu’ils ont montés : la Colo.
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Très très vaguement basé sur mon histoire personnelle, à bien des niveaux, Qui nous sommes est un roman épistolaire, composés de points de vue différents sur la vie dans les quartiers de banlieues provinciaux.
Ayant grandit dans un quartier de Cholet, ville moyenne du Maine-et-Loire, mon expérience de la vie de cité populaire n’est pas celle dépeinte dans les films ni dans les incessants plateaux télés sur les dangers de l’ensauvagement des cités.
Ce roman est plusieurs choses, il est à la fois un condensé de discussions récurrentes avec des amis qui n’arrivent jamais à se figurer pourquoi ou comment j’en suis arrivé à baisser les bras et à me vider de tout enthousiasme à l’idée d’un futur meilleur, il est aussi un cri de frustration à l’encontre de la déshumanisation rampante de populations entières par les médias dominants encouragés en premier lieu par des candidats politiques.
Être une punchline dans un meeting de campagne électoral peut paraître anodin, inoffensif ou tout simplement légitime pour certains ; mais on ne se pose pas trop la question de ce que cela représente pour les cibles invisibles et inaudibles de ces attaques récurrentes.
Qui nous sommes essaye d’aller en profondeur dans l’optique des populations racisées de France, qui sont ostracisées par leur dirigeant politique, déconsidérés par les médias et bien mal représentés dans les films et le divertissement. L’intelligence, le savoir faire, l’honneur et l’humanité qui est à l’œuvre dans les quartiers populaires ne sont que trop rarement mis en avant.
Et quel est le résultat d’une telle propagande ? Comment vivre avec ce poids ? Comment s’en sortir (comme diraient les néolibéraux) ?
Ce roman démontre une certaine impasse de la logique individuel, et tend à montrer que même si l’individu peut faire société, il lui est quasiment impossible de faire quoi que ce soit contre un système qui est organisé pour le rabaisser plus bas que terre, le mépriser et in fine, le tuer puis qu’il n’est en aucun cas considéré comme un humain à part entière, avec ses aspirations, ses besoins, ses envies et ses talents.
La question de la représentation est également au sein de ce roman. Comment se construire une image de soi, comme se projeter dans un futur où la vue est bouchée. Ce roman comme une envie de dire qu’il est désormais temps de penser le problème de race, de l’exorciser, parce que derrière ces vies brisées par l’oppression et le dédain avant même d’avoir commencé, il y a des hommes et des femmes sensibles et intelligents, des humains à part entière.
Ce livre essaye de parler du néocolonialisme d’une façon plus littéraire que les sciences sociales. Il essaye de mettre en lumière le joug d’une domination aveugle à l’existence même de sa domination.
Ce que j’essaye donc de dire ici, c’est : voici le problème. Les solutions que vous nous apportez, d’éducation, d’assistance sociale ne sont que les traitements de symptômes dont le mal profond passe inaperçu dans le débat public, voir, plus gravement, dans la conscience même de ceux que le problème affecte. Opprimés révoltés, mais sans savoir contre quoi, sans pouvoir l’exprimer, sans avoir la capacité d’articuler le problème, c’est aussi ça la force de l’oppression de race en France : ôter les mots et donc la capacité de penser et de philosopher sur le problème.
Ce livre essaye donc de faire ça : remettre en place les mots et les concepts pour pouvoir souligner et articuler les problèmes fondamentaux. Réussir à décaler la notion d’identité raciale vers une notion de classe de race.
